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VOICI L'INTERVIEW D'UN PIRATE QUI A COMPRIS LA LECON !!!
JV> Rémi, merci d'avoir accepté de répondre à nos questions. Peux-tu te présenter brièvement à nos lecteurs ?
Rémi> Rémi 20 ans, étudiant en psychologie
JV> Peux-tu nous parler des activités qui t'ont été reprochées par la justice ?
Rémi> Comme beaucoup de gens, je récupérais des jeux sur le net, je faisais des échanges aussi par la Poste. J'échangeais pas mal de jeux, je voyais surtout là un bon moyen d'agrandir ma ludothèque rapidement : jouer aux derniers hits pour pas cher sinon rien. Face au prix élevé des jeux neufs c'est un moyen facile pour assouvir sa passion.
Puis, j'ai commencé à les vendre... C'était un moyen de se faire de l'argent facilement pour quelqu'un qui n'avait pas de revenus comme moi. Je copiais les jeux, je les envoyais par la Poste et les gens me réglaient par chèque... Ca a duré environ un an...
JV> Donc pendant une année, tu copies, tu échanges et finalement tu te mets à vendre des jeux pirates. Quand tout à coup... ?
Rémi> Subitement, au cours de l'été 2001, je reçois chez moi une convocation de la police. C'est pas le genre de choses agréables à recevoir. Cette convocation m'informe que je dois passer un entretien auprès d'un officier de la police judiciaire... Ma mère un peu inquiète, appelle alors la police pour savoir de quoi il s'agit. L'officier l'informe qu'il enquête sur des faits de piratage de logiciels.
Quelques jours après, je me rends à la convocation.
Pour montrer ma bonne foi, j'avais réuni tous les CD pirates que j'avais chez moi (à peu près une centaine) et je les avais apportés avec moi. Je suis tombé sur un officier très compréhensif, mais qui faisait néanmoins son métier. Il m'a interrogé sur mes activités, histoire d'évaluer le nombre de copies, depuis combien de temps j'avais un graveur, quelles étaient mes connaissances en informatique et sur internet... Il avait en main une liste complète des jeux que je vendais !!
En fait, c'est là que j'ai appris que quelqu'un s'était fait passer pour un acheteur potentiel et m'avait demandé ma liste afin de me confondre...
Après cet entretien qui a quand même duré plus de 2 heures, je suis reparti chez moi. Le policier m'a un peu rassuré en me disant que ce ne serait probablement pas trop grave.
Et là plus de nouvelle pendant un an... Je me dis que l'affaire est classée, et j'ai bien entendu stoppé mes activités de revente, échaudé par cet épisode.
JV> Et pourtant l'histoire ne s'arrête pas là. Que s'est-il passé ensuite ?
Rémi> L'été suivant, nous sommes en juillet 2002. Nouveau coup de théâtre car nouvelle convocation, mais cette fois beaucoup plus méchante... Là j'ai rendez-vous à la gendarmerie. Je m'y rends et là on m'informe que je suis carrément convoqué par le tribunal de grande instance le 9 octobre pour recel de logiciels piratés !!! On me pose quelques questions pour savoir si j'ai déjà été condamné, si j'ai le permis de conduire, histoire de me ficher... On m'informe aussi que je peux me défendre sans avocat, ou alors en prendre un à ma charge. Je ressors de là un peu éberlué !
Quelques jours après, je trouve un avocat avec lequel j'ai 2 entretiens successifs... Il connaît pas trop le domaine, comme la plupart des avocats je suppose... Mais il m'informe quand même que je risque jusqu'à 2 ans de prison et une très forte amende...
JV> Puis, vient le jour du procès...
Rémi> Oui. Là, on est le 9 octobre 2002... Je suis jugé pour piratage de logiciels... Je passe après un employé qui travaillait au noir, un homme blessé pendant son travail et qui porte plainte contre son employeur, il y a même (mais à huits clos) des gens jugés pour tentative de viol... Je passe après un gars qui est jugé pour avoir loué illégalement des jeux vidéo... Ca y est c'est mon tour.
Grande salle d'audience, bien meublée, presque agréable mais surtout impressionnante. Bureau des juges surélevé. Les deux parties se tiennent chacune d'un côté. Je suis près de mon avocat. On m'appelle pour témoigner à la barre devant les juges, et on me fait rasseoir. Puis tout se débat sur moi mais sans moi. Niveau vêtement c'est comme à la télé. On a droit aux robes noires et à "Votre honneur", "Maître truc" ...
Une partie civile a été constituée, elle est descendue de Paris spécialement pour moi... Elle requiert 7800 euros d'amende. Le procès va durer environ une demi-heure. Au final, le juge prononce ma condamnation : je vais devoir payer 500 euros d'amende, je vais donner 350 euros pour l'ensemble des parties civiles et payer aussi des sommes pour les éditeurs de jeux lésés dans l'affaire (soit 1475 euros). Plus tard, j'aurai aussi les frais d'avocat à régler (600 euros).
Je ressors du procès et là, je me dis que c'est fini, terminé définitivement. Mon avocat précise que la condamnation ne figure pas à mon casier judiciaire. Donc, bien content que le procès soit derrière moi.
JV> Là c'est un peu le soulagement, et pourtant, ce n'était pas complètement terminé...
Rémi> Exactement, on arrive début 2003 (en février je crois), un matin alors que j'étais en cours, une conseillère rentre dans ma classe et vient me chercher. Elle me dit que ma mère vient d'appeler : je dois rentrer chez moi immédiatement, sans connaître la raison... J'arrive chez moi et là, stupeur : 3 policiers sont déjà sur les lieux pour perquisitionner. Ils fouillent ma chambre de fond en comble, passent tous les placards, embarquent tous les CD. Ils allument même le PC, regardent les emails, cherchent le logiciel de gravure de CD qui est installé... Puis, ils m'embarquent avec la petite dizaine de CD copiés qu'il me restait dans un coin, je vais au poste. La perquisition aura duré une heure et demie environ.
Je me retrouve donc au poste. Là, je suis placé en garde à vue et j'ai droit à une audition en bonne et due forme jusqu'à la fin de la matinée... Pendant le déjeuner, les policiers me mettent en cellule, je suis même menotté à un banc. Au retour du déjeuner, ils m'informent que je suis surveillé depuis plusieurs mois. En effet, mon compte bancaire a été mis sous surveillance afin de garder les traces de tous les chèques de ceux qui m'ont acheté des jeux. Ils me montrent des photocopies de chèques, ils ont constitué un bon gros dossier...
J'apprends alors qu'ils n'étaient pas au courant que j'avais été condamné le 9 octobre. Ils continuent quand même leurs investigations. A la fin ils appellent la première partie qui m'avait jugé... Tout cela dure jusque vers 4 ou 5h de l'après-midi. J'ai donc passé presque tout le jour entre la perquisition chez moi et le poste de police...
Enfin, ils me disent qu'ils me rappeleront et qu'il n'y a rien de très important. Ils ont vu que j'avais payé... Le lendemain, soulagement : ils me rappellent pour me dire que le dossier est classé.
JV> Merci pour ce témoignage. As-tu un message à faire passer aux lecteurs de JeuxVideo.com ?
Rémi> Oui, même si ça paraît simple d'échanger sur le net, on reste toujours surveillé, et maintenant plus que jamais ils font bien la chasse. Tôt ou tard si on laisse son nom ou son adresse sur la toile, on risque beaucoup pour pas grand-chose... Maintenant je suis fiché, mon dossier peut être réouvert à tout moment pendant 3 ans, donc réfléchissez...
Au final je débourse beaucoup d'argent (2900 euros) pour pas grand chose (une centaine de copies vendues et des échanges). Il faut savoir que les poursuites envers les "traders" et les vendeurs deviennent de plus en plus nombreuses. Se voir condamner, passer à la barre devant Monsieur le juge, ça calme ! Mon conseil : trouvez-vous des jobs d'été et achetez des jeux originaux ! Ou bien tournez-vous vers les vendeurs d'occasion où quelques bonnes affaires n'attendent que vous.
J'espère que Messieurs les Pirateurs que vous avez compris la leçon !!!